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Δευτέρα 22 Απριλίου 2024

Ομιλία Éric de Moulins-Beaufort, Προέδρου της Συνελεύσεως ΡΚαθολικών Επισκόπων Γαλλίας, προς Βαρθολομαίον [fr]

Discours de Mgr Éric de Moulins-Beaufort, Président de la CEF, au Patriarche Bartholomée 1er

Sainteté,

Que vous veniez rendre visite au siège de la Conférence des évêques de France, des évêques catholiques, à l’occasion de votre visite officielle à notre pays, encourage chacun des évêques et chacune de celles, chacun de ceux, qui travaillent ici, partageant une part de la mission de l’Église. En vous, nous qui nous tenons dans la communion de l’apôtre Pierre, nous accueillons l’apôtre André, celui qui a su conduire son frère auprès du Seigneur, celui vers qui Philippe guida les « Grecs » qui demandaient à voir Jésus pour qu’il en parle au Maître. Soyez remercié, Sainteté, de consacrer une bonne heure de votre programme chargé à apporter jusqu’ici la grâce de votre venue. Je le dis de tout cœur au nom de celles et ceux qui sont rassemblés dans ce hall et de celles et ceux qui s’unissent à nous dans la communion de l’Esprit-Saint : « Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! »

Il y a dix ans et quelques mois, en janvier 2014, vous étiez venu à Paris rencontrer le Président de la République, M. François Hollande, et M. Hulot, alors en charge de la préparation de la COP 21. Vous aviez accepté de recevoir de l’Institut catholique de Paris un doctorat honoris causa. Dans l’important discours que vous aviez prononcé alors, vous exposiez les fondements de l’écologie chrétienne : la vision sacramentelle du monde qui n’est pas un réservoir de ressources pour l’instinct de prédation de l’humanité mais un signe du Dieu vivant, de sa bonté et de sa beauté ; l’esprit eucharistique devant l’univers, une attitude faite d’émerveillement et de gratitude ; la pratique de l’ascèse et du jeûne, si prégnante dans la vie des fidèles orthodoxes qui ne mangent ni viande ni produits laitiers.

Une grande partie de l’année, pratique qui ne vient pas d’un quelconque mépris du monde mais qui est bien au contraire, vous le souligniez, une marque de respect pour chaque être et d’attention à tous les autres ; le sens vif de la solidarité entre les humains, surtout les plus pauvres, premières victimes de la pollution, les premiers privés de respirer un air pur et de boire une eau saine. À un an de la parution de l’encyclique Laudato Sì du pape François, à un an et demi de l’ouverture de la COP 21, vous manifestiez avec force, en cette ville de Paris, les ressources de la foi chrétienne pour penser la crise écologique du monde et proposer des chemins de sortie qui ne soient pas de pseudo-solutions techniques mais un approfondissement et un élargissement de l’humanité, sous le régime paradoxal de la frugalité évangélique. Notre Conférence des évêques a tiré profit, Sainteté, de votre parole, en consacrant pendant trois ans un jour et demi de ses assemblées plénières au thème de la transformation écologique, avec pour visée de nourrir la réflexion, la prédication et la pratique dans les diocèses.  Nous vous remettrons tout à l’heure le livre récapitulant nos travaux.

Votre attention au drame de la pollution et à l’épuisement des ressources de notre planète vient chez vous avant tout d’une intelligence profonde de la liturgie proprement chrétienne et d’une conscience forte de votre mission de patriarche de Constantinople, chargé de veiller à l’unité de la foi et de la pratique, dans la fidélité aux premiers conciles, tous tenus en Orient, et aux commencements de la vie chrétienne, née en Orient pour le bien du monde entier. Vous avez conscience, Sainteté, de l’unité de l’humanité, non seulement des humains aujourd’hui présents sur cette planète, qui sont reliés les uns aux autres par tant de liens technologiques ou techniques, économiques et politiques, mais des humains, depuis le premier jusqu’au dernier, tenus ensemble par le Dieu créateur, donnés les uns aux autres comme des frères et des sœurs engagés dans une histoire commune. Vous portez fortement en vous la conscience que l’histoire trouve son unité dans la croix du Christ, dans sa tête couronnée d’épines, dans le don libre qu’il fait de lui-même et qu’il nous donne de célébrer en chaque Eucharistie. Lui, le Verbe par qui tout a été fait, réconcilie les humains avec le Père et entre eux et avec tout le créé, par-delà tout ce qui peut les séparer et les opposer.  C’est en ce mystère célébré, contemplé, adoré, que vous puisez la force de chercher l’unité au milieu des tensions si vives en ce monde, y compris entre les Églises chrétiennes, surtout lorsque la volonté de puissance et les calculs politiques cherchent à s’emparer de la force de l’unité dans la foi et à remplacer l’ouverture mutuelle dans l’amour par la domination de l’un sur d’autres ou la revendication de droits perpétuels à posséder ce qui fait vivre d’autres. Vous le dites et le redites inlassablement : « Nous avons l’obligation éthique de résister à la guerre en tant que nécessité politique et de promouvoir la paix en tant que nécessité existentielle » et vous expliquez : « En choisissant l’alternative de la transformation par la paix, nous devrions alors nous rappeler que finalement la paix débute toujours en notre cœur. De plus, la paix prend beaucoup de temps et de labeur. Néanmoins, elle nous offre le seul espoir de survie en tant qu’individus nations, espèce. »[1] Vous essayez depuis des décennies d’incarner une culture de la paix, plus exigeante que toute culture de guerre, plus humanisante ou plutôt plus divinisante aussi, avec une attention particulière à fonder la relation entre les religions dans le mystère de la foi chrétienne lui-même, délimitant aussi soigneusement le rôle des responsables religieux à l’égard des fidèles et à l’égard de tous. C’est que vous avez une vive conscience que le nom de Dieu dépasse tout nom que les humains peuvent lui donner et que le Dieu vivant veut que chacun ouvre son cœur au dialogue avec Lui et avec les autres[2]. Ainsi, Sainteté, tâchez-vous inlassablement de servir un modèle d’unité de l’humanité dont la source se trouve en la Trinité sainte.

L’Église catholique en France est en quelque sorte consubstantielle à l’histoire de ce pays. Pourtant, depuis trois siècles, elle vit dans une société et une culture travaillées par un fort mouvement de sécularité qui participe à celui qui anime tout le monde occidental mais qui a ses particularités propres. Vue de loin, notre Église peut paraître affaiblie ; elle l’est, incontestablement, selon bien des critères de mesure. Elle a été, ces toutes dernières années, fortement ébranlée par la mise au jour des violences et agressions sexuelles et des abus de pouvoir spirituel commis en son sein, en particulier par ceux qui devraient être des ministres du Seigneur de la vie. Pourtant, permettez-moi de le dire ici : notre Église est vivante, et elle ne cesse pas d’engendrer, par la grâce de Dieu, des saintes et des saints qui seront mis dans la lumière le moment venu, comme Dieu voudra. La sécularisation des esprits et des pratiques vient en particulier de l’incroyable essor de la technique et de la technologie dont l’Occident s’est rendu capable et qu’il a partagé, avec plus ou moins de générosité ou de cupidité, au monde entier ; elle vient aussi, il faut le reconnaître, d’un refus délibéré de la révélation du Seigneur Jésus en tant que telle. Dans notre pays tout particulièrement, la société veut s’organiser sans référence à Dieu, sinon comme à un patrimoine dépassé. C’est que les Français, plus sans doute que d’autres peuples, se représentent volontiers la liberté comme autonomie, ils veulent vivre en adultes émancipés et se méfient de toute tutelle qui les ramènerait au statut d’enfants mineurs. Mais l’histoire de la rencontre de l’humanité avec le Dieu vivant est loin d’être achevée ; elle passe par des phases d’accueil reconnaissant et par des phases où les cœurs s’endurcissent, par des phases aussi où les témoins de la foi sont émondés pour que leur témoignage soit plus vrai, plus dégagé des concupiscences et des peurs de ce monde. Aujourd’hui, si la société politique et culturelle ne veut plus être chrétienne, des hommes et des femmes découvrent ou redécouvrent la joie de chercher Dieu et de se laisser trouver par lui. Alors même que beaucoup autour de nous vivent sans Dieu ou se détachent de leur religion, les musulmans sont devenus nombreux ici, soit par leur appartenance familiale soit parce qu’ils ont découvert dans la pratique de l’islam un exercice de leur dignité humaine, mais aussi des hommes et des femmes continuent d’être chrétiens et quelques-uns qui commencent à devenir nombreux aspirent à l’être.

Les catholiques en France sont rejoints, vous le savez, Sainteté, par des protestants, des dénominations historiques ou bien évangéliques charismatiques ou pentecôtistes et aussi par des chrétiens des grandes Églises orthodoxes et orientales-orthodoxes, de plus en plus nombreux ici, tant arméniens, égyptiens, indiens, syriens, que grecs ou russes ou bulgares, roumains, serbes, ukrainiens. Nous, évêques catholiques, nous sentons affermis par le témoignage de foi que les fidèles orthodoxes ou orientaux peuvent donner dans un pays comme le nôtre. Je me réjouis de pouvoir exprimer publiquement ma gratitude pour la relation vraiment fraternelle que nous avons avec l’assemblée des évêques orthodoxes de France. Ce me fut une joie très profonde, Sainteté, que de pouvoir vous le dire lors de ma visite au Phanar avec le Pasteur Christian Krieger en février dernier, il y a quelques semaines, à l’invitation du cher Métropolite Démétrios, visite où Christian Krieger et moi-même avons été honorés de déjeuner avec le Saint-Synode et heureux de retrouver le Métropolite Emmanuel. Ce sont d’autres aspects de la richesse de notre unique Seigneur qui sont ainsi approchées de nos concitoyens sans religion ou croyants et qui viennent aussi féconder notre vie sociale et nos expressions culturelles. Nous sommes convaincus que des saints et des saintes inattendus se lèveront ainsi et renouvelleront notre histoire, comme l’ont fait jadis saint Martin et sainte Geneviève, saint Rémi et saint Vincent de Paul, saint Thomas d’Aquin et sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus pour n’en citer que quelques-uns. La visite de votre Sainteté, en notre capitale et notre pays, confortera assurément les fidèles orthodoxes en leur diversité, afin qu’ils apportent leur note propre au témoignage rendu au Christ Seigneur dans notre pays. Après tout, une grande partie de l’histoire intellectuelle de notre Occident est venue de la réception de Denys qui fut aéropagite au moins dans la vérité du cœur et de la foi. Nous aurons à cœur de fêter ensemble l’an prochain le 1700ème anniversaire du concile de Nicée et de confesser notre foi en Jésus, le Fils consubstantiel au Père. Je suis sûr que notre société française, prise depuis des décennies dans une relation compliquée avec le Seigneur Jésus et son Église, redécouvrira avec bonheur la sacramentalité du monde et la vie ascétique qui est la juste attitude envers tous les êtres dont les différentes Églises chrétiennes, orthodoxes, apostoliques, catholiques, protestantes, vivent et sont l’expression en ce monde déjà.

Je suis honoré et heureux, Sainteté, de vous accueillir ici au nom des évêques catholiques de France. Tous suivent avec attention votre visite en notre pays. Avec eux tous, avec celles et ceux qui m’entourent en cette occasion, je vous souhaite une visite fructueuse en notre pays de France, vous assurant que nous sommes nombreux à attendre de vos paroles encouragement et renouvellement.

[1] Patriarche œcuménique Bartholomée, À la rencontre du mystère. Comprendre le christianisme orthodoxe aujourd’hui, coll. « Orthodoxie », Paris, Éditions du Cerf, 2011, p. 254.

[2] Idem, p. 237.




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